Le Toucher du monde – Dialogue entre les collections du FRAC Auvergne et du musée Paul-Dini
Du 17/03/2023 au 17/09/2023
Musée Paul-Dini à Villefranche-sur-Saône

L’exposition Le Toucher du monde réunit les œuvres du FRAC Auvergne et du musée Paul-Dini, dans un dialogue jouant sur les résonances d’œuvres et d’artistes qui, pour certains, sont présents dans les deux collections. Cette exposition met en relation les œuvres selon des liens qui, parfois, relèvent de familiarités entre artistes, parfois se tissent par échos poétiques ou formels s’inspirant du célèbre jeu enfantin du Marabout (bout de ficelle, selle de cheval, etc.).
Le parti pris volontairement ludique de cette exposition place le visiteur face aux mondes que chaque artiste bâtit de manière intime et que nous sommes invités à envisager dans leur étrangeté, leur singularité, leur langue personnelle. Le propos de cette exposition est de comprendre ce qui se joue là, dans la relation nouée entre l’artiste et le destinataire de son œuvre.
L’un des éléments de réponse est sans doute apporté par Franz Schrader, géographe, randonneur, dessinateur, peintre et cartographe qui, en 1897 lors d’une conférence donnée au Club Alpin de Paris, exprimait son amour des montagnes. Dans cette intervention intitulée « À quoi tient la beauté des montagnes1 », il expliquait comment celles-ci devaient être regardées, dessinées ou peintes : « Pourquoi, comment, à cause de quoi ces montagnes sont-elles si belles ? Première question suivie d’une autre : après tout, qu’est-ce qui me prouve qu’elles sont réellement belles ? Je les trouve telles ; soit, mais n’est-ce pas en moi seul que réside leur beauté ? N’est-ce pas là une chose toute subjective et liée à mon éducation ? ». Il poursuit en affirmant que « celui qui sent une beauté aura toujours raison contre celui qui ne la sent pas ; celui qui voit contre celui qui ne voit pas, celui qui s’émeut contre celui qui ne s’émeut pas. »
L’énoncé de Franz Schrader à propos de sa passion pour les montagnes entretient une enthousiasmante analogie avec ce que devrait toujours être notre relation à l’art et à la culture plus généralement. N’allons pas voir de peinture, de théâtre, d’installations, de films, de danse, ne lisons pas de littérature ou de philosophie dans une quête d’apprentissage. L’apprentissage ne devrait venir qu’en second plan et être précédé d’une quête, bien plus vivante, plus essentielle. Cette quête est celle de l’étreinte, des étreintes avec le monde. Alors, nous devons nous poser les mêmes questions que Franz Schrader et tenter de comprendre « à quoi tient la beauté de nos étreintes » et de tenter de savoir pourquoi sommes-nous parfois touchés ?
« Touché », le mot est important car c’est quand l’œuvre me « touche », qu’elle m’émeut, me meut, déplace en moi les réglages fins de mes sensations, qu’elle s’interpose comme un nouveau filtre entre le monde et ce que je suis. Être touché, c’est sans doute ce qui constitue la quête inconsciente de notre rapport à l’art.
1 – Franz Schrader, À quoi tient la beauté des montagnes (1897), Paris, Isolato, 2009.
Jean-Charles Vergne
Directeur du FRAC Auvergne
Artistes :