Clémence MAUGER

Née en France en 1991 - Vit à Marseille et Montreuil

Les recherches picturales de Clémence Mauger se déploient autour des motifs végétaux qu’elle découvre dans son cadre de travail. Sa peinture puise sa source dans une banque d’images collectée lors de ses déambulations quotidiennes. Elle se compose principalement de photographies de paysages, souvent nocturnes. La présence des plantes est toujours de l’ordre du surgissement, quasi surnaturel ; la flore jaillit telle une vision hallucinée, souvent augmentée par la nuit et les éclairages urbains. Elle obtient des textures et des couleurs similaires en travaillant sur une toile apprêtée avec du gesso mélangé à de la poudre de marbre ou sur un mur générant des fonds blancs qui restent très présents dans la composition finale. Elle utilise une peinture très diluée pour obtenir des aplats transparents et des effets de coulures. Le processus semble mimer le développement photographique analogique — développement de négatifs, tirage et trempage d’images, ouvrant une potentialité à ses peintures de révéler les artifices du paysage.

À propos de Clusters of purple marbles

Une des qualités visuelles du raisin est sa fine et fragile couche blanchâtre qui disparaît sous les doigts. On dirait de la condensation, on dirait un produit chimique, on dirait de la poussière, mais si fine et régulière, qu’elle en est extraordinaire. On dirait beaucoup de choses à vrai dire avec Clusters of purple marbles car les grappes accumulées travaillent l’ambiguïté d’une manière curieuse qui conduit à télescoper le raisin et les cellules hépatiques. Il existe une familiarité entre ce tableau et les vues microscopiques aux couleurs artificielles sous une lame de verre rétro-éclairée. Clusters of purple marbles est peinte à l’aquarelle sur du bois apprêté avec un mélange à la poudre de marbre. Le pigment semble déposé en fine couche pulvérisée et le fond blanc très lisse transparaît et irradie à travers la couleur. Il est bien difficile de définir dans quelle réalité et à quelle distance ou quelle échelle se trouve le motif. L’enjeu du tableau se trouve probablement quelque part dans le spectre large de ces possibilités.

À propos de Moon pods 1 et 2

Lorsque l’on a découvert les premières images de l’univers qui remontent à la nuit des temps, il y avait de quoi être un peu désappointé : une curieuse neige vibrante tapisse le fond des âges. Ce bruit si commun dans la photographie lorsque la lumière est trop basse est le souvenir lointain des structures universelles. Dans Moon pods 1 et 2, on ne distingue pas vraiment ce que l’on voit mais on ressent immédiatement cette résonance spectrale. Deux éléments peuvent être distingués dans ces peintures pour tenter leur description : d’abord la répétition de motifs circulaires qui semblent être la trace lointaine d’une efflorescence organique qui se déploie en vagues. Ensuite un fond semblable à un bruit télévisuel multicolore et pastel qui diffuse sur toute la surface du tableau. L’ensemble est baigné d’une atmosphère paradoxalement éteinte et lumineuse. Les couleurs extrêmement pâles se déposent sur le fond blanc comme une buée agitée. Les fréquences chromatiques qui vibrent à travers tout le tableau font écho aux cercles et trajectoires blanches qui repoussent les particules dans le cadre. Les projections végétales, en cours de dissolution quantique, s’apparentent bien à la fois à des particules et à des ondes. Ces tableaux, c’est de la lumière !

 

Julien Bouillon